Je suis Conseiller en Insertion Professionnelle dans le sud du Val de Marne

Encore, encore des bilans à faire signer aux candidats!!!!

Des bilans que probablement personne ne lit.

J'essaie de faire de la qualité et de retracer fidèlement la progression des candidats durant la prestation mais ce que je sais de source sure c'est que Pole emploi ne vérifie que les informations purement administratives : si le mail du candidat est bien indiqué, si le numéro de téléphone du conseiller Pole Emploi est bien renseigné (comme si il était possible de les contacter et de leur parler des demandeurs d'emploi!!!), si le cadencement des rendez vous est bien respecté, si le numéro de l'agence est le bon etc....

Sur le candidat en lui meme : RIEN. Sur son implication dans sa recherche : RIEN. Sur la qualité de ses outils de recherche d'emploi : RIEN. Sur les barrières qu'il se met lui meme et qui empeche le retour à l'emploi : RIEN.

Tant que le demandeur d'emploi sera seulement un numéro identifiant,  Pole Emploi continuera à etre une machine à broyer les chomeurs.

Aujourdhui une de mes candidates signe un contrat aidé (CAE) pour travailler dans le secteur non marchand c'est à dire une association.

Pour Pole emploi, signer un contrat dans le secteur non marchand n'est pas considéré comme étant une sortie positive. Si le contrat aidé avait été signé dans le secteur marchand ( entreprise privée) Pole emploi aurait considéré cela comme une sortie positive.

Je ne comprend pas le sens que Pole emploi donne au terme "contrat de travail". Y aurait il un vrai et un faux contrat de travail? Un valable et un non valable? Est ce que travailler 35 heures rémunérées dans une association n'est finalement aux yeux de Pole emploi qu'un passe temps? Un "job"?

Ou bien le fait de financer par les fonds publics ce type de contrat (jusqu'à 95% du SMIC) pousse Pole Emploi à considérer que finalement financer un CAE ou bien verser des Assedic c'est la meme chose?

Là encore la dimension humaine de l'insertion professionnelle et les éléments positifs d'un retour à l'emploi d'un demandeur d'emploi sont ils ne serait ce que vaguement envisagés?

Melle A. est photographe. Elle anime - à défaut d'autre chose- des ateliers de calligraphie dans des écoles.

Elle a un très bon niveau de formation (BAC+5) mais ne trouve pas d'emploi pérenne. A 29 ans elle a des problèmes pour payer son loyer, ne gagne en moyenne que 600 à 700 euros par mois et, de ce fait, ne peut pas prétendre au RSA.

Suite à une demande de formation sur Photoshop (en relation directe avec sa formation d'origine), la réponse de Pole emploi a été "Désolé il n' y a plus de budget"..

La situation de Melle A.est emblématique : on laisse des jeunes se former dans des métiers qui ne présente aucune employabilité, durant les études en faculté il n'y a pas d'information donnée sur les débouchés professionnels, une fois sur le marché du travail les structures d'accompagnement ne font pas leur travail. La vocation de Pole emploi n'est pas d'etre seulement un organisme payeur mais aussi d'etre un organisme qui aide à trouver et à mettre en place des solutions pour trouver un emploi.

Dans le cas de Melle A. si Pole Emploi avait financé une formation coutant environ 2500 euros, cela aurait facilité son insertion professionnelle, aurait permis à l'Etat d'engranger des revenus (URSSAF...), aurait augmenté son pouvoir d'achat.

Le retour sur investissement est elle une notion connue de Pole emploi?

Aujourdhui je fais les accueils des nouveaux candidats. Les Demandeurs d'emploi sont orientés par les conseillers Pole Emploi.

Quand ils arrivent dans mon bureau, je ne sais rien d'eux à part leur nom, prénom et numéro de téléphone.

A chaque fois c'est une découverte. Parfois il y a de bonnes surprises et des rencontres intéressantes. Parfois les candidats ont tellement de problématqiues personnelles et sociales ( addiction, pauvreté, dépression....) que meme le contact est difficile, une conversation soutenue de 15/20 mn devient compliquée à gérer . La plus grande partie sont des personnes en exclusion sociale ou sur le point de l'etre; des personnes qui se laissent glisser et qui choisissent de ne plus agir, des personnes qui ne sont plus aidées dans leurs démarches pour retrouver un emploi.

Mr JB arrive très détendu. A l'heure. Sachant à peu près la raison de son entretien avec moi. Mais sans CV ni lettre de motivation. Mr JB est sans emploi depuis 2 ans. Il arrive en fin d'indemnisation ASSEDIC et commence à se rendre compte des difficultés futures. Toutefois son épouse travaille. Après 10 mn d'entretien il me dit que durant 2 ans il a élevé son enfant. Que ses disponibilités horaires sont de 9h00 ( entrée à  l'école) à 16h00 (heure de sortie d'école) et qu'il doit trouver une emploi très proche de chez lui. Aucune recherche depuis 2 ans et donc aucun entretien de recrutement.

Durant la conversation j'ai fais tomber toutes ses barrières qui l'empechent de retourner à l'emploi. Il a bien pris conscience des choses. Finalement en lui expliquant ce qu'est l'ASS ( personne ne lui a expliqué auparavant) il me répond qu'après tout 480 euros par mois pour élever son enfant c'est pas si mal.

Mr JB n'est pas entré en prestation avec moi.

Mme AI ne se présente pas à l'entretien. C'est son fils qui vient à sa place pour m'expliquer que sa mère est en congés en province depuis 2 mois (!)

Mr B. me téléphone pour me dire qu'il ne se sent pas bien et qu'il ne viendra pas à son entretien. Je lui explique les risques de radiation mais il préfère ne pas venir.

J'ouvre mon blog aujourd'hui. J'ai murement réfléchi cette décision.

Le métier de Conseiller en Insertion Professionnelle permet d'etre en immersion totale dans les problématiques sociales du pays

Il permet aussi de mesurer l'écart entre les discours officiels et les réalités sur le terrain, ainsi que l'impact des décisions gouvernementales sur les personnes en recherche d'emploi.